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Cultures sous serre

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Avec Insolagrin, Insolight concilie photosynthèse et photovoltaïque

Posté le par Benoît CRÉPIN dans Innovations sectorielles

Créée en 2015, la start-up suisse Insolight a développé une solution d’agrivoltaïsme dynamique permettant de combiner, sur une même surface de culture, la production de denrées et d’électricité. Baptisée Insolagrin, la technologie devrait être déployée à grande échelle dès le printemps prochain.

Le défi était de taille : concilier photosynthèse et photovoltaïque. Une jeune pousse basée en Suisse – Insolight – l’a pourtant relevé, en développant une ingénieuse solution permettant de combiner, sur une même surface cultivable, production d’électricité solaire et production végétale. Baptisé Insolagrin et adapté à la culture sous serre ou sous ombrières en plein champ, le dispositif est le fruit d’un parcours entrepreneurial débuté en 2015 par trois diplômés de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL).

« Nous avions tous les trois, dès le départ, un vrai intérêt pour l’énergie solaire. Nous voulions avant tout trouver un moyen d’améliorer le rendement de la production d’électricité par les panneaux photovoltaïques. Et puis au fil du temps, l’agrivoltaïsme est apparu à nos yeux comme un marché intéressant, auquel nous pourrions apporter notre contribution », retrace Mathieu Ackermann, directeur technique et cofondateur d’Insolight aux côtés de Laurent Coulot et de Florian Gerlich.

Les trois néo-entrepreneurs ont ainsi entamé un important travail de R&D axé, au départ, sur une technologie de concentration des rayons du soleil sur les cellules photovoltaïques à l’aide de lentilles. Après avoir fait ses preuves dans le cadre d’installations pilotes, l’approche a toutefois été mise de côté au profit d’une solution plus compétitive, basée quant à elle sur un système d’écran réfléchissant.

Un écran réfléchissant, premier pilier d’Insolagrin

« Après évaluation, cette solution nous est apparue comme plus avantageuse sur tous les plans, notamment au niveau de son coût et de ses performances. De plus, la technologie repose sur des éléments, notamment l’écran réfléchissant, qui peuvent être fournis par des acteurs bien connus des agriculteurs, qui ont déjà une bonne réputation auprès d’eux », explique Mathieu Ackermann.

Un écran réfléchissant devenu ainsi la clé de voûte de la solution développée par Insolight. Rétractable, il peut en effet être déployé au-dessus des cultures pour les protéger d’un excès de lumière, tout en renvoyant alors les rayons du soleil vers des panneaux solaires. Et en cas de baisse de luminosité, l’écran peut aussi, à l’inverse, être en partie ou totalement replié pour permettre aux plantes de bénéficier d’un éclairement maximal. Un astucieux dispositif qui ne serait rien, toutefois, sans des panneaux solaires d’un genre un peu particulier.

Des modules solaires semi-transparents et bifaciaux

Installés en lieu et place des vitres formant le toit de la serre, les panneaux photovoltaïques reçoivent en effet par le dessous le surplus de lumière réfléchie par l’écran lorsqu’il est déployé au-dessus des cultures. Pour en tirer parti, leur face inférieure doit donc elle aussi être capable de convertir l’énergie solaire en électricité. Et à cela s’ajoute un autre impératif, celui de la transparence : les rayons du soleil doivent également pouvoir atteindre les plantes. Une quadrature du cercle – à première vue – qu’Insolight est pourtant parvenue à résoudre grâce à des panneaux dits « bifaciaux » et en partie transparents. « Notre solution Insolagrin repose, outre l’écran réfléchissant, sur des modules solaires silicium que nous appelons THEIA[1]. Ils sont semi-transparents, et ce grâce à des espaces ménagés entre les cellules, qui laissent donc passer une grande partie de la lumière, autour de 60 % », décrit Mathieu Ackermann. « Ces modules sont aussi bifaciaux, c’est-à-dire qu’ils sont capables de collecter la lumière à la fois sur leur face avant et sur leur face arrière », poursuit le directeur technique de la jeune pousse suisse. De quoi obtenir un rendement jusqu’à 30 % supérieur à celui de panneaux conventionnels, notamment en hiver. Insolight estime ainsi à environ 700 kW par hectare la puissance moyenne qu’une installation sera capable d’atteindre.

Solution Insolagrin, Insolight
S’adressant notamment aux cultures de baies et autres petits fruits, la solution Insolagrin développée par Insolight combine modules photovoltaïques bifaciaux semi-transparents, écran réfléchissant rétractable et logiciel de gestion. © Insolight

Un troisième pilier logiciel

Outre la partie matérielle constituée par cette ingénieuse combinaison de panneaux photovoltaïques bifaciaux semi-transparents et d’un écran réfléchissant amovible, Insolight a concentré une autre partie de ses efforts sur la partie logicielle. Une brique technologique tout aussi indispensable au bon fonctionnement d’Insolagrin, comme le dévoile Mathieu Ackermann : « Nous avons développé un système de pilotage de l’écran réfléchissant basé sur les données fournies par des capteurs de lumière, de température et d’humidité installés auprès des plantes. Une boucle de rétrocontrôle permet d’automatiser le déploiement de l’écran et d’en déterminer la surface. Insolagrin est ainsi une solution d’agrivoltaïsme dynamique ».

En route vers un déploiement à grande échelle

Désormais mature, la technologie développée par Insolight se dirige vers un déploiement à grande échelle, notamment au profit des producteurs de baies et autres petits fruits tels que fraises, framboises ou encore myrtilles. « Ces cultures ont besoin d’ombrage mais aussi d’une protection contre les aléas comme la pluie ou la grêle, ce que permet justement Insolagrin », souligne Mathieu Ackermann, qui n’exclut par ailleurs pas d’autres cibles : arboriculture – pommiers, abricotiers… – ou encore viticulture. Insolight travaille ainsi actuellement sur une quarantaine de projets de déploiement de sa solution d’agrivoltaïsme dynamique. En Suisse, certes, mais aussi en France, en Allemagne et en Italie. « Deux ou trois d’entre eux devraient voir le jour dès le printemps prochain, les permis étant déjà déposés », glisse Mathieu Ackermann. Des projets qui devraient couvrir des surfaces de l’ordre d’un demi à quelques hectares.

« La culture de baies représente à elle seule des centaines de milliers d’hectares en Europe. Le potentiel est donc colossal », souligne le directeur technique d’Insolight, qui imagine déjà convertir une partie de la célèbre « mer de plastique » espagnole à la technologie Insolagrin.

Une ambition sans doute loin d’être irréaliste, alors qu’Insolight a annoncé, en décembre dernier, une levée de fonds de pas moins de 4,85 millions de Francs suisses, soit près de 4,89 millions d’euros. De quoi lui permettre, dans un premier temps, d’atteindre son objectif principal pour 2023 : déployer une première installation de grande envergure.


[1] Translucent High-Efficiency In Agrivoltaics

Pour aller plus loin

Posté le par Benoît CRÉPIN


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