On sait depuis quelque temps que les déchets plastiques s’accumulent dans les 5 gyres : Atlantique nord et sud, Pacifique nord et sud, océan Indien. Autour du globe, près de 270.000 tonnes de plastiques flottent dans les océans. On sait aussi que les mers semi-fermées, comme la Méditerranée, et les côtes sont polluées par des tonnes de micro-fragments de plastique. Cette étude dévoile que la pollution s’étend même jusqu’au pôle Nord, dans les zones les plus reculées.
« Les concentrations en plastique dans les eaux arctiques étaient faibles, comme nous nous y attendions, mais nous avons découvert un secteur au nord des mers du Groenland et de Barents [la partie nord de l’Atlantique Nord] présentant des teneurs relativement élevées », dévoile Andrès Cózar, professeur à l’Université espagnole de Cadix et directeur de l’étude. Dans cette zone, jusqu’à 63.000 fragments ont été mesurés par kilomètre carré. Cet écosystème reculé est menacé. Et si le plastique entrait dans la chaîne alimentaire ?
Les chercheurs estiment que cette zone contiendrait déjà entre 100 et 1.200 tonnes de plastiques flottants. L’estimation moyenne se situe à 400 tonnes, constituées de 300 milliards de fragments. 95% de ces fragments de plastique se concentrent dans la zone d’accumulation des mers du Groenland et de Barents. Mais rappelons-nous que si tant de plastiques flottent, cela signifie que les fonds arctiques doivent regorger encore davantage de plastiques.
Du plastique transporté d’Atlantique Nord vers l’Arctique
La taille des fragments et leur typologie suggère qu’ils sont issus de sources éloignées. Les modèles de circulation de surface et les données de terrain montrent que la branche polaire de la circulation dite « thermohaline » transfère des débris flottants de l’Atlantique Nord aux mers du Groenland et de Barents. Celles-ci formeraient un cul-de-sac favorable à l’accumulation des débris flottant.
Ces micro-fragments flottants ne sont donc pas majoritairement produits par la faible population locale. Une petite partie provient de l’augmentation de l’activité maritime dans cette zone. Mais la plupart est transportée par les courants océaniques à grande échelle. Elle est issue du gyre de l’Atlantique Nord, de la côte est des États-Unis, des côtes du nord-ouest de l’Europe et du Royaume-Uni. La zone d’accumulation située en Arctique se nourrit donc du plastique libéré à des latitudes plus basses.
Ces résultats découlent de l’exploitation des données issues de l’expédition Tara autour de l’Océan Arctique en 2013. La goélette Tara a réalisé des prélèvements de microplastiques sur 42 sites autour du bassin Arctique pendant cinq mois. Des filets Manta ont été tirés à 15 cm de profondeur pendant 20 minutes pour prélever les fragments supérieurs à 0,3 mm.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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