En 2014, l’Ile-de-France ne recyclait que 28 % des 462 kg de déchets ménagers et assimilés produits par habitant de la région. A Paris, ce taux est encore plus faible, puisqu’il n’atteignait que 17,4%. Ces mauvais résultats sont loin de la moyenne française (39 %). Et pourtant… Ces résultats nationaux sont déjà loin de la moyenne européenne de 44,6 %. Sans parler des allemands qui recyclent 64% de leurs déchets. La loi Grenelle avait fixé un objectif de 45% de déchets recyclés pour 2015. Et la loi de transition énergétique pour la croissance verte va encore plus loin, puisqu’elle prévoit un objectif de recyclage de 55 % en 2020 et de 65 % en 2025.
La Cour des comptes dénonce la précarité du recyclage en Ile-de-France. Mais encore davantage à Paris. Un immeuble sur trois n’y a pas de bac pour les bouteilles et un sur six pour les papiers les emballages. La capitale ne comprend que 887 conteneurs à verre pour 2,2 millions d’habitants. Par ailleurs, la région ne compte que 174 déchetteries publiques, dont 75% en grande couronne. Cela équivaut à une installation pour 69 000 habitants, contre une pour 14 000 habitants dans le reste de la France. Mais Paris intra-muros ne compte que 8 déchetteries. 10 nouvelles devraient être installées d’ici 2020.
Même lorsque les Franciliens trient, la qualité n’est pas au rendez-vous. La Cour des comptes note que la qualité de la collecte est « très médiocre» et « sans amélioration depuis 2005 ». En effet, à l’entrée des centres de tri, 25,7% des déchets collectés étaient encore refusés en 2014, sans amélioration depuis des années. Le plan régional fixait un objectif de 20 % en 2014 et de 15 % en 2019… Et pour cause : les Franciliens font beaucoup trop d’erreurs de tri. La Cour des comptes note une communication beaucoup trop faible sur les consignes de tri qui sont « parfois obsolètes et souvent mal comprises ».
Des biodéchets à recycler !
La collecte sélective des biodéchets est « inexistante », note le rapport. Pourtant, les biodéchets alimentaires représentent un quart des déchets collectés dans les ordures ménagères. Les sages notent que même pour les restaurants produisant plus de 300 repas par jour et des commerces alimentaires, la collecte des biodéchets alimentaires reste quasi-inexistante en Île-de-France, alors que la loi l’impose depuis janvier 2016 et prévoit sa généralisation d’ici 2025. Des villes telles que Lorient et Montpellier sont pionnières en France.
Pour améliorer le recyclage, la Cour propose de développer le dépôt volontaire de bacs par quartier, de moderniser les centres de tri, et d’organiser la collecte selon 4 flux de matériaux : le verre, les emballages légers, les biodéchets et les cartons/papiers. La Ville de Paris a récemment annoncé le lancement d’une expérimentation pour la collecte des biodéchets des particuliers dans les 2e et 12e arrondissements ainsi qu’une collecte pour le secteur de l’hôtellerie et de la restauration.
Une organisation « éclatée » et peu performante
Malgré ces faibles performances, les coûts sont élevés. Le coût de gestion du service public des déchets s’élève à 72€ HT par habitant, contre 63€ HT en moyenne en France. La Cour des comptes souligne une organisation « éclatée » et peu performante qui ne prend pas en compte la recomposition en cours de l’intercommunalité. En effet, 26 organismes différents s’occupent du traitement des déchets pour 12 millions d’habitants. La moitié s’occupe également de la collecte. Le Syctom s’occupe des déchets de 5,6 millions d’habitants et traite à lui seul 44 % des déchets franciliens. Le Sirédom dans l’Essonne, deuxième syndicat francilien en termes de population couverte, ne traite que 7% des déchets.16 % des déchets franciliens sont traités par 12 syndicats qui couvrent chacun moins de 200 000 habitants. Le Smirtom du Vexin couvre le plus petit bassin de collecte, avec 66 918 habitants.
La Cour des comptes propose d’interdire pour une intercommunalité d’adhérer à plusieurs syndicats de traitement afin de permettre aux préfets « d’engager la recomposition de ces syndicats de traitement, selon un calendrier progressif, tenant compte des contraintes d’exploitation des équipements ».
Une collecte trop chère !
Pour financer la collecte, les collectivités franciliennes ont choisi à 95% la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (contre 68% au niveau national) et à 4% la redevance d’enlèvement des ordures ménagères (contre 29% au niveau national). Seulement 19 communes financent la collecte grâce à leur budget général. La tarification incitative qui permet de moduler la contribution des usagers en fonction de la qualité de déchets réellement produite, n’est appliquée que par quatre communes franciliennes. La Cour des comptes propose de la développer.
Les déchets issus de l’industrie, des commerces et des services peuvent être collectés et traités en tant que déchets « assimilés » aux déchets ménagers. Ils représentent le quart des déchets collectés en Ile-de-France. Ces organismes générateurs de déchets ne sont mis à contribution via la redevance spéciale que par 30% des communes, pour un montant global correspondant à 5% du coût de gestion. Quant aux producteurs de produits mis sur le marché, partiellement assujettis au financement via les filières de responsabilité élargie du producteur (REP), avec 8% des déchets pris en charge, leur contribution en Île-de-France est inférieure à la moyenne nationale. La Cour des Comptes propose donc de revoir le barème de contribution des éco-organismes Eco-Emballages et Eco-Folio.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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