Le salon du Bourget bat son plein et dans un contexte considéré comme morose, Airbus voit les bonnes surprises se succéder. L’industriel totalise 206 ventes de son modèle A321 XLR venant de huit clients différents, après trois jours de salon. Une bonne nouvelle d’autant qu’American Airlines, client historique de Boeing, en a commandé 50. Ce jeudi l’industriel français est en tête des ventes puisqu’il en totalise plus de 400, loin devant Boeing (279).
Pour le moment les contrats signés ne sont que des protocoles d’accords. Et une partie des ventes sont en fait des conversions de commandes d’A320 déjà passées. Mais ce bon « décollage », comme l’a qualifié le directeur commercial d’Airbus Christian Sherer, répond à une stratégie précise: occuper le terrain des vols longue distance – l’A321 peut parcourir jusqu’à 8700 km – avec une capacité de passagers plus faible que celle des gros porteurs traditionnels (240 sièges maximum). Le but ? Offrir aux compagnies la possibilité d’ouvrir de nouvelles lignes entre des villes secondaires avec un monocouloir moins coûteux. Et donc plus rentable. Même si la stratégie divise, les compagnies aériennes s’interrogeant sur la capacité des passagers à choisir des avions moyen courrier – et donc moins confortables – pour de longs vols.
Boeing au fond du trou ? Non
Le concurrent américain d’Airbus, Boeing, qui traverse une crise sans précédent suite aux deux crashs de ses 737 MAX en Indonésie et en Ethiopie (346 morts) et à l’interdiction de vol qui frappe ce modèle depuis plus de trois mois, a également enregistré une bonne nouvelle. Une méga commande de 200 appareils de la part du groupe IAG – des 737 MAX ! – pour plus de 24 milliards de dollars. Le résultat d’une stratégie de communication millimétrée qui a vu tout l’état major du géant américain multiplier les mea culpa depuis quelques jours, tout en insistant sur l’importance de la sécurité des appareils et le temps qu’il faudrait à Boeing pour regagner la confiance du public, après ce double crash. Et enfin cette méga commande, qui remet le 737 MAX dans la course, même si l’appareil ne vole plus pour le moment. Finement joué. Et assez inattendu.
Pour Airbus et son nouveau patron Guillaume Faury, qui a dévoilé la stratégie de l’entreprise pour les années à venir, les défis sont nombreux. Et variés. Environnement, justice, usine du futur, avion du futur… avion du futur d’ailleurs évoqué au Bourget par le patron d’Airbus: « il est très probable qu’après 50 à 60 ans de stabilité dans l’architecture des avions, nous voyions des changements radicaux, même si les technologies ne sont pas encore matures ».
Voler plus et polluer moins…
Mais il y a plus urgent pour Airbus, qui traverse une période charnière. L’arrêt du programme A380 et les développements judiciaires autour d’irrégularités sur des transactions – irrégularités dénoncées par le groupe lui-même – a soulevé des interrogations dans l’entreprise qui a besoin d’une stratégie claire pour les années à venir. Notamment en ce qui concerne les émissions polluantes. Le secteur du transport aérien, pourvoyeur massif de GES, subit une pression de plus en plus grande. Même si beaucoup a déjà été fait, selon Guillaume Faury: « le transport aérien représente aujourd’hui entre 2% et 2,5% des émissions mondiales de CO2, mais sans les progrès déjà réalisés depuis 20 ans par le secteur, cela atteindrait 8% à 10% ».
Mais l’avion du futur et la baisse des émissions, s’ils constituent avec le développement du numérique les piliers de la stratégie d’Airbus pour le futur, cachent une problématique plus terre à terre. L’incapacité de l’avionneur français à livrer ses avions dans les temps. Et sur le court terme c’est ce qui pourrait coûter le plus cher. En effet, le rythme des livraisons en 2018 a fortement ralenti. La faute aux aléas subis par les motoristes qui équipent la version Neo de l’A320. Airbus doit corriger le tir dès cette année, alors que l’entreprise devra livrer un peu moins de 900 avions en 2019. C’est 100 de plus que l’an dernier.
Cet article se trouve dans le dossier :
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