Des chercheurs travaillant sur un programme environnemental commun des Nations Unies et du World Agroforestry Centre estiment que l'intégration sur une grande échelle de l'agroforesterie dans les systèmes d'exploitation créerait un réservoir vital pour le stockage du CO2. Le Panel intergouvernemental sur le changement climatique a recensé à cet effet pas moins d'un milliard d'hectares de terres exploitables dans les pays en développement.
Selon la définition donnée par le World Agroforestry Centre, l’agroforesterie est « un système dynamique de gestion des ressources naturelles reposant sur des fondement sécologiques qui intègre des arbres dans les exploitations agricoles et le paysage rural, et permet ainsi de diversifier et de maintenir la production afin d’améliorer les conditions sociales, économiques et environnementales de l’ensemble des utilisateurs de la terre ».Le secteur agricole représente aujourd’hui « l’option la plus importante de stockage du CO2 si de meilleures pratiques de gouvernances sont adoptées », selon un rapport du PNUE (Programme des Nations Unies pour l’environnement) publié en juin. Six gigatonnes équivalentes de CO2 ou 2 Gt de CO2 pourraient être capturées et stockées chaque année d’ici 2030. D’après le rapport, cela correspond aux émissions actuelles dans l’agriculture.Travailler à cet objectif est d’autant plus prometteur que beaucoup de ces pratiques agricoles « vertes » peuvent être appliquées à peu de frais. De plus, 70 % de ce potentiel est réalisable dans les pays en développement, toujours selon le PNUE.
Réduire la demande d’engrais commercial
« Si elle était appliquée dans les cinquante prochaines années, l’agroforesterie pourrait permettre de supprimer 50 milliards de tonnes de CO2 dans l’atmosphère, soit près d’un tiers des objectifs de réduction des émissions dans le monde », a déclaré Dennis Garrity, directeur général du World Agroforestry Centre et co-président du Congress Global Organizing Committee, dans un communiqué de presse du PNUE.Une étude réalisée par les chercheurs du World Agroforestry Centre sur les fertilisants pour arbres qui capturent le nitrogène dans l’air et le transfèrent dans le sol, montre que leur utilisation peut réduire la demande d’engrais commercial à base de nitrogène de 75 % tout en doublant ou en triplant la surface des champs cultivés. « Ces résultats devraient rendre l’agroforesterie attractive aux yeux des fermiers », note Garrity.Mais l’incapacité d’obtenir des mesures fiables, de superviser, anticiper et vérifier la quantité de CO2 capturée et stockée par les fermiers constitue un obstacle majeur.En mai, le PNUE, le World Agroforestry Centre et le General Environment Facility de l’ONU dirigé par la Banque Mondiale ont lancé le projet dit « Carbon Benefits Project » pour combler ce manque en croisant différentes données (teneur en CO2 des sols obtenues par télédétection, mesures souterraines et statistiques).
Sur la route de Copenhague
Le sous-secrétaire général des Nations Unies et directeur exécutif du PNUE, Achim Steiner, a mis l’accent sur la nécessité d’adopter une approche naturelle et humaine tout en vantant les mérites de pratiques agricoles durables en ce qui concerne la nourriture, l’énergie, la sécurité de l’emploi ainsi que la pauvreté et la préservation de la biodiversité.Steiner a également pressé les responsables politiques d’adopter de telles mesures dans chaque accord sur le changement climatique qui suivra le protocole de Kyoto. L’enjeu est crucial au regard de l’urgence d’aboutir à un accord global sur le climat à Copenhague en décembre prochain : « l’avenir de l’agriculture et du mode de vie des fermiers est en jeu.Les nations doivent s’entendre sur la réduction des émissions issues de la déforestation et de la dégradation des forêts (REDD). Un tel accord ouvrira la voie à la préservation des forêts et autres écosystèmes et réduira les inégalités dans la demande mondiale de bois durable en déplaçant la production de la forêt à la ferme. L’agriculture sera soit une partie du problème soit une partie importante de la solution. »
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