Bascule vers le marché
Les énergies renouvelables ont réalisé une progression spectaculaire dans le mix électrique mondiale (+ 167 GW dans le monde pour la seule année 2017 selon l’Irena) grâce notamment à de généreuses subventions publiques. Ces dernières se sont caractérisées par des aides directes ou encore des tarifs de rachat de l’électricité produite, un système très en vogue notamment en Europe, qui a produit une rente et une visibilité confortable aux développeurs de parcs éoliens, photovoltaïques, etc. En France par exemple, un parc éolien construit dans les années 2000 bénéficie encore aujourd’hui de ces tarifs d’achat grâce au contrat de 20 ans souscrit avec EDF, l’opérateur national obligé de racheter à prix fixe l’électricité générée par ledit parc. Un système qui a permis de rassurer les investisseurs de l’époque et de créer un effet d’entraînement et d’échelle, avec à la clé une réduction des coûts qui rend aujourd’hui ces énergies rentables, notamment le solaire photovoltaïque.
Comme convenu, ces contrats de 20 ans s’éteindront progressivement dans les années à venir (c’est déjà le cas pour ceux signés à la fin des années 90) et il n’est pas question pour l’Etat de continuer à subventionner des infrastructures largement amorties et qui ont rapportés une rente (certains diront excessive) à leurs propriétaires. Pour autant, elles continueront de fonctionner et seront donc désormais rémunérer dans le cadre d’un mécanisme de marché. Une évolution prévue mais qui n’enchante pas forcément tous les exploitants d’énergies renouvelables qui pour certains appréhendent le passage sur le marché dont les prix sont assez bas et surtout fluctuants. C’est là qu’interviennent les agrégateurs.
L’intermédiaire trader
L’agrégateur est l’intermédiaire entre le producteur d’électricité et le marché. A la fois technicien et trader, il rachète selon des conditions définies à l’avance la production d’une installation renouvelable et la revend soit directement à des clients, soit à la bourse de l’électricité. Pour l’exploitant, cet intermédiaire lui donne une visibilité sur les revenus qu’il va tirer de sa production d’électricité avec des contrats plus ou moins indexés sur les fluctuations du marché en fonction du niveau de risque qu’il accepte de prendre. L’agrégateur cherche quant à lui à se constituer un stock d’installations le plus large possible et surtout les plus complémentaires. En effet, les centrales éoliennes, solaires ou hydroélectriques ne fonctionnent pas de manière optimale au même moment de la journée mais leur mutualisation permet de créer une sorte de centrale virtuelle. L’agrégateur dispose ainsi d’une vue d’ensemble sur les centrales qu’il administre grâce à des capteurs et interfaces de communication complexes type Scada. Il peut en quelques minutes décider de stopper/relancer la production d’une centrale grâce à des système de contrôle à distance afin de tirer le meilleur profit en temps réel des fluctuations des cours de l’électricité.
Des compétences pluridisciplinaires
Pour maximiser l’utilisation des centrales et les revenus générés, les spécialistes de l’agrégation s’appuient sur des ingénieurs aux compétences très diverses. Il y a bien sûr les spécialistes des technologies de communication pour faire remonter les informations issues des centrales, les experts de la big data pour traiter le volume considérable desdites informations, en passant par les opérateurs de marchés financiers. Sans oublier les scientifiques météorologiques qui élaborent des prévisions ultrafines pour anticiper les vents pour les parcs éoliens, l’ensoleillement pour les centrales solaires d’un jour sur l’autre, afin de limiter autant que faire se peut les écarts entre la production anticipée et réelle. Autant de compétences jusqu’ici dispatchées et désormais réunies au sein de mêmes structures telles que Statkraft, Agregia la filiale d’EDF, Vattenfall, Solvay Energy Services, la filiale du groupe chimique, Engie ou encore Uniper, entre autres.
Romain Chicheportiche
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