Un million. C’est le nombre d’objets d’origine humaine de plus d’un centimètre en rotation autour de la Terre évalué par l’Agence spatiale européenne (ou ESA pour European Space Agency). Ces débris proviennent principalement de la fragmentation de satellites obsolètes se disloquant dans l’espace. Leur nombre devrait augmenter dans les années à venir, face à la multiplication des lancements, notamment en orbite basse. Alors que 540 satellites étaient actifs en 2003 dans l’espace extra-atmosphérique, leur nombre s’élève aujourd’hui à 8 700. Entiers ou réduits à l’état de débris, ces objets polluent l’espace et peuvent entrer en collision avec des satellites encore opérationnels. L’OPECST (Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques) a publié une note dans laquelle elle formule plusieurs recommandations pour remédier à cette situation.
Les auteurs conseillent « d’approfondir les efforts de surveillance et d’exploitation et de traitement des données de suivi ». Ce suivi permettra, entre autres, d’éviter encore davantage les collisions en identifiant les risques de rapprochement et de prendre une décision de manœuvre si un risque est avéré. Il faut savoir qu’en moyenne, pour chaque satellite en orbite basse, une manœuvre est réalisée chaque année et en 2023, la Station spatiale internationale a dû effectuer 6 manœuvres. L’Union européenne met déjà en œuvre un programme de suivi grâce à l’utilisation de 3 lasers, 9 radars et 28 télescopes, mais le plus grand catalogue de débris est tenu par l’armée américaine, qui recense plus de 28 000 objets de plus de 10 cm en orbite basse ou de plus de 1 mètre en orbite géostationnaire.
Autre recommandation : « suspendre tous les essais de destruction de satellites ». Seulement quatre pays l’ont fait à ce jour : les États-Unis, la Russie, la Chine et l’Inde. Pour ces derniers, il s’agit généralement d’une démonstration de force, car la destruction d’un satellite en tirant un missile depuis la terre est une prouesse, puisqu’il faut non seulement tenir compte de la longue distance, mais également de la trajectoire de la cible et sa vitesse. Dernier exemple en date avec la Russie qui a détruit en 2021 son satellite Cosmos 1408, qui orbitait autour de la terre. Il s’est éparpillé en un nuage de quelque 1 500 débris orbitaux d’au moins 10 centimètres de diamètre.
Une mission de retrait d’un débris spatial menée par l’ESA en 2026
La délivrance d’autorisations de lancement sous condition de solutions durables pour la fin de mission est une autre préconisation de l’OPECST. « Pour l’avenir, la réglementation doit inciter les opérateurs à prévoir la quantité de combustible (ergols) suffisante pour propulser vers une orbite cimetière le satellite en fin de vie », écrivent les auteurs. Ils ajoutent que des questions de coût entrent en jeu. D’après leurs estimations, « entre 85 % et 100 % des objets spatiaux ayant atteint leur fin de vie au cours de la dernière décennie en orbite géostationnaire ont déjà tenté de se conformer aux normes en vigueur relatives à la limitation des débris. Entre 60 % et 90 % d’entre eux y sont parvenus, soit en tout état de cause plus de la moitié du total de l’effectif. »
Enfin, débuter rapidement un retrait des débris les plus dangereux en orbite basse devient une nécessité face à leur multiplication. Ce travail doit être réalisé au rythme de : « environ 10 gros débris chaque année, en commençant naturellement par les 50 plus dangereux », selon un expert du CNES interrogé. En 2026, l’ESA va lancer la mission ClearSpace-1 dont l’objectif est de ramener en toute sécurité un adaptateur Vespa de la fusée VEGA, en orbite depuis 2013 et pesant 112 kg. Cette mission est réalisée à l’aide d’un bras robotique et est préparée en partenariat avec la start-up suisse ClearSpace SA. En 2018, l’ESA avait lancé une première mission d’élimination active des débris dans le cadre du projet RemoveDebris et avait démontré la viabilité de technologies telles que la capture par filet ou le harponnage. À présent, l’opérateur Eutelsat équipe ses satellites en orbite basse d’une surface de préhension ouvrant la possibilité qu’ils soient à terme récupérés par un système de grappin.
En début d’année, l’entreprise japonaise Astroscale a conduit une première expérimentation de retrait de débris en orbite grâce à un système de capture magnétique puis de désorbitation, appelé ELSA-d. Une seconde expérimentation, baptisée ADRAS-J19, a consisté à réaliser une approche afin de faciliter la récupération de déchets inertes. Le satellite ADRAS-J s’est placé en déplacement synchrone avec un étage supérieur de la fusée H2A japonaise, mesurant environ 11 mètres de long, 4 mètres de diamètre et pesant environ 3 tonnes. Il a ainsi pu caractériser l’état et la trajectoire de ce déchet, de même que les risques induits par lui. Il s’agit d’une étape préalable à une opération de retrait.
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