Cette découverte, qui a fait l’objet de la Une de la revue ACS Macro Letters de décembre 2017, est à la fois facile à mettre en œuvre, peu coûteuse et très efficace. L’adhésion en milieu humide est particulièrement recherchée pour des applications en bioingénierie, en électronique et dans le domaine médical où de nombreuses surfaces sont humides. A titre d’exemples, on a développé des adhésifs synthétiques imitant les protéines présentes sur le pied des moules, mais ces adhésifs ont montré leurs limites : adhésion irréversible, performances qui se dégradent par oxydation et coût de production élevé. D’autres adhésifs chimiques comme le cyanoacrylate posent le problème de forces d’adhésion par cisaillement insuffisantes ou de la présence de composés toxiques. L’approche adoptée par l’équipe de l’Unist (Ulsan National Institute of Science and Technology – Corée du Sud), menée par le Pr. Hoon-Eui Jeong a donc consisté à jouer sur la microstructure d’un hydrogel pour rendre deux surfaces adhésives de manière stable mais réversible via un procédé à la fois simple et peu onéreux.
Jouer sur la microstructure
Le principe de fonctionnement repose sur un interverrouillage réversible via des rangées de micro-crochets qui sont reconfigurables. Les chercheurs ont fabriqué un réseau de crochets à l’échelle micrométrique par un moulage de répliques avec un PEGDMA ( polyethylene glycol dimethacrylate). Le PEGDMA est un hydrogel qui peut absorber une grande quantité d’eau ou de solutions physiologiques et qui peut être traité par exposition aux UV pour une fabrication rapide de structures aux échelles micro voire nanométriques. Les chercheurs affirment par ailleurs que d’autres hydrogels aux propriétés similaires pourraient aussi être utilisés. Au final, le PEGDMA prend la forme d’un fin film flexible qui lui permet d’être facilement intégré à toutes sortes de systèmes.
L’adhésion est créée par contact entre deux feuilles de PEGDMA ainsi fabriquées en condition sèche. Elle est effective via l’emboîtement des crochets les uns aux autres. L’adhésion est alors légère. Au contact de l’humidité, les têtes des micro-crochets de l’adhésif deviennent plus larges et plus protubérantes engendrant un verrouillage plus solide. Plus le temps d’exposition à l’humidité est long, plus l’adhésion est forte (dans le sens du cisaillement). Ainsi, après 20h de gonflement à l’humidité, la force d’adhésion a été mesurée à 79,9 N.cm–2 contre 9.6 N.cm–2 en milieu sec, soit une adhésion plus de 732 % supérieure. Un modèle théorique simple décrivant l’évolution des forces d’adhésion en fonction du temps de gonflement a pu être bâti, il semble être en concordance avec les données expérimentales. Quand, l’hydrogel est séché, les têtes des micro-crochets se rétractent et l’adhésion s’arrête. Le process est ainsi réversible.
Par Sophie Hoguin
Dans l'actualité
- Un « métamatériau » à mémoire de forme
- A la recherche de la mousse éternelle
- Recherche et innovation : quels chantiers pour Frédérique Vidal ?
- Biologie moléculaire : à la recherche des ARN circulaires ?
- Une nouvelle méthode de synthèse des matériaux joue au billard avec les ions
- Une nouvelle technique expérimentale pour des matériaux plus résistants aux déformations extrêmes
- Cristallographie : quand un ordre inattendu émerge d’un matériau nanostructuré
- Un hydrogel thermosensible à base de protéines pour l’administration ciblée de médicaments
- Une colle sous-marine décollable à l’électricité
Dans les ressources documentaires