Une étude parue dans The Energy Journal explore la possibilité d’une électricité 100% renouvelable en France en 2050. Face à l’incertitude des coûts des moyens de production à cette échéance, 315 scénarios sont étudiés. Explications.
Le Cired dévoile les résultats d’une étude parue dans The Energy Journal menée par deux de ses chercheurs et l’un de ses anciens chercheurs, désormais à l’institut I4CE. Ils ont développé un modèle open source pour la France continentale basé sur des données publiques, afin d’explorer le mix optimal de production et de stockage 100 % renouvelable capable de satisfaire la demande électrique heure par heure en 2050.
« Nous avons différents moyens de produire l’électricité : l’éolien maritime et terrestre, du solaire photovoltaïque, trois types d’hydrauliques – de lacs, au fil de l’eau et des stations de transfert d’énergie par pompage – du biogaz, de l’électrolyse pour produire de l’hydrogène qui combiné avec du CO2 produit du méthane de synthèse par méthanation, utilisé dans des turbines à gaz, et des batteries stationnaires », détaille Philippe Quirion, chercheur CIRED-CNRS et co-auteur de l’étude. Ces technologies suffisent à assurer un mix 100 % renouvelable en 2050.
Un coût du système électrique stable quel que soit le mix
L’ensoleillement et les vents étant difficilement prévisibles à l’horizon 2050, les profils horaires éolien et photovoltaïque reposent sur 18 années de données météorologiques historiques (2000-2017) issues de la Nasa et de la littérature scientifique. Le modèle se base sur le profil de consommation électrique horaire du scénario central de l’Ademe pour 2050.
« Le mix électrique optimal est très dépendant des coûts supposés pour 2050, ce qui peut expliquer les débats portant sur les technologies, souligne Quentin Perrier, chercheur au I4CE, ex-CIRED, et co-auteur de l’étude. Cela dépend parfois des hypothèses de coût et les optimisations sont assez sensibles à cela ». Si le mix électrique est variable, le coût total du système électrique reste toutefois stable.
Le scénario central de coût, se basant sur les projections du centre de recherche de la commission européenne (JRC) pour l’année 2050, prévoit un parc optimisé constitué à 46 % d’éolien sur terre, 31 % de PV, 11 % d’éolien offshore, 3 % de biogaz, 3 % d’hydraulique de lac et 6 % d’hydraulique de rivière. Quel que soit le scénario, le coût moyen de l’électricité oscille autour de 52 euros par mégawattheure, un coût proche de l’actuel. Philippe Quirion explique : « Le coût du système électrique est peu sensible aux coûts des technologies. Ces technologies sont largement substituables. Si par exemple le photovoltaïque s’avère être plus cher que ce que l’on pensait, on peut faire plus d’éolien et vice-versa. »
Choisir un système électrique sur la base d’une anticipation erronée des coûts n’entraîne qu’un regret de 4 %. En ce sens, Quentin Perrier prévient : « Mon message en matière de politiques publiques : il ne faut pas forcément attendre en cherchant le mix optimal parce que la bonne question est davantage de savoir comment on développe les investissements dans ces différentes filières pour avancer. »
Le coût du stockage n’est pas du tout prohibitif
Le modèle repose sur trois moyens de stockage d’énergie : des batteries, la méthanation et les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP). Ce stockage n’impacte pas tant le coût du système électrique. « Ce coût se répartit à 85 % dans les moyens de production et 15 % dans les moyens de stockage », prévient Philippe Quirion. « On entend beaucoup de messages qui disent que si l’on met que des énergies renouvelables variables, le coût de gestion va exploser, complète Quentin Perrier. Ce n’est pas ce que l’on observe : le coût du stockage reste entre 15 % et 23 % suivant les scénarios. »
Les chercheurs ont volontairement retenu des hypothèses pessimistes. « D’une part, on s’interdit les importations et les exportations d’électricité, ce qui pénalise l’équilibre économique, prévient Philippe Quirion. De l’autre, on s’interdit la flexibilité de la demande aux fluctuations de la production, ce qui est important pour un système basé sur les énergies renouvelables ». En ce sens, ils estiment que leurs projections de coûts restent conservatrices.
Un outil en ligne pour tester les différents scénarios
Quentin Perrier explique l’utilisation de l’outil interactif mis en ligne pour accompagner la sortie de l’article. « En fonction des hypothèses de coûts sur les différentes technologies que vous rentrez, l’outil calcule le mix électrique optimal à partir d’énergies renouvelables pour la France en 2050 sur la production et le stockage selon les 315 scénarios de coûts ».
Philippe Quirion complète : « Le modèle choisit le parc d’investissement dans les moyens de production et de stockage et le fonctionnement de ce parc qui permet de satisfaire la demande d’électricité pour chaque heure de l’année sans aucun délestage, c’est-à-dire sans demande non satisfaite ».
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