En cours d’installation sur le site CEA-Saclay depuis juillet 2017, le colosse magnétique de 132 tonnes est désormais pleinement opérationnel. Les équipes ont dû pour cela relever tous les défis que représente la mise en œuvre d’un tel équipement.
- Connecter l’aimant aux équipements auxiliaires déjà installés et testés (usine cryogénique, alimentations électriques, système de contrôle-commande).
- Atteindre une température homogène de 1,8 K : l’aimant doit être refroidi à 1,8 K (- 271 °C), température à laquelle l’hélium, son « liquide de refroidissement », est dans un état physique particulier, dit « superfluide ». À ce niveau de température, le conducteur qui compose l’aimant (alliage niobium-titane) n’oppose alors aucune résistance au courant électrique qu’il transporte, évitant ainsi toute dissipation du courant et tout échauffement : il est à l’état supraconducteur.
- Monter par palier pour atteindre 11,7 T(1) : une fois le conducteur refroidi à sa température nominale, il a fallu ensuite injecter progressivement le courant dans l’aimant pour atteindre le champ magnétique prévu de 11,7 T. Cette « montée en puissance » s’est réalisée en plusieurs étapes, avec de nombreux essais électriques et magnétiques, ainsi que des tests des procédures d’arrêt d’urgence. En tout, 1 300 procédures prévues pour détecter l’apparition de défauts potentiels ont été testées.
Pour atteindre son champ magnétique nominal, l’aimant est alimenté par un courant de 1 500 ampères, et les bobines de conducteur sont en permanence refroidies par 7 000 litres d’hélium à l’état superfluide. Avec un champ magnétique de 11,7 T c’est un record mondial dans le domaine de l’IRM, et un record absolu avec ce type de matériau supraconducteur. La fabrication de ce prototype de 132 tonnes, de 5m de longueur pour 5 m de diamètre extérieur, et 90 cm de diamètre intérieur, aura demandé six ans dans les usines de Alstom – devenu GE – à Belfort ; et près de deux ans de travaux d’installation et de tests, pour arriver à sa mise en service opérationnelle.
Au cours des prochains mois, de nombreux équipements seront ajoutés à l’aimant pour le transformer en appareil d’IRM à même de réaliser des images du cerveau de volontaires : bobines de gradients, antennes radiofréquences, lit patient, habillage extérieur.
À propos du projet Iseult
Les neuroscientifiques ont voulu se doter d’un scanner IRM à 11,7 T afin de sonder le cerveau humain avec des qualités d’observation jamais atteintes, que ce soit au niveau de la résolution spatiale ou de la résolution temporelle, ou encore au niveau de la précision des images obtenues. Le projet Iseult est né au tournant du 21ème siècle avec l’objectif ambitieux de développer un aimant de très grande taille (90 cm d’ouverture) générant un champ magnétique de 11,7 T. Le projet a été porté conjointement par les chercheurs en neurosciences et des physiciens du CEA spécialistes des aimants à l’Irfu et de l’IRM à l’institut Joliot. La conception et la réalisation de cet aimant, cœur du scanner IRM, ont ainsi mobilisé les chercheurs et leurs partenaires – académiques et industriels – pour une livraison à Neurospin, sur le site du CEA-Saclay, en mai 2017.
Le projet Iseult s’intègre dans une coopération franco-allemande initiée en 2006. Il résulte d’une collaboration entre :
- des partenaires industriels (Siemens Healthineers, Bruker Biospin, Alstom –intégré aujourd’hui à General Electric–, et Guerbet) ;
- des partenaires académiques (l’Université de Freiburg, la Direction de la Recherche fondamentale du CEA) ;
- un soutien financier partiel d’agences publiques (en France : Bpifrance, en Allemagne : le Ministère fédéral allemand de l’Éducation et de la Recherche).
(1) Champ magnétique terrestre : 5.10-5 T ; IRM hospitaliers standards : 1,5 à 3 T ; aimants du LHC : 8,5 T ; il existe également des IRM de faible diamètre, uniquement utilisés dans le cadre de recherches précliniques, pouvant atteindre des champs magnétiques de 17 teslas.
Source : CEA
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